Adoption du rapport de l’Examen périodique universel (EPU) de l’Irak – Point 6 (2 juillet 2025)

Rapport – 26ᵈ réunion de la 59ᵉ session du Conseil des droits de l’homme


La 26ᵉ réunion du Conseil des droits de l’homme des Nations Unies, consacrée à l’adoption du rapport final de l’EPU de l’Irak, s’est tenue le 2 juillet 2025 à Genève. Cette session a permis aux représentants du gouvernement irakien, des États membres et de la société civile d’exprimer leurs observations sur les recommandations formulées lors de l’examen.

S.E. Abdul-Karim Hashim Mostafa, Représentant permanent de l’Irak, a souligné l’adoption de la loi sur les survivantes yézidies, les efforts en faveur de l’égalité de genre, de la justice transitionnelle et de la protection des enfants ainsi que l’engagement du gouvernement à mettre en œuvre les recommandations acceptées et à coopérer avec les mécanismes internationaux.

Des délégations de plusieurs pays ont pris la parole : les Philippines, le Qatar, le Royaume-Uni et la Belgique ont salué les mesures prises pour renforcer les droits des femmes, la justice et l’inclusion, tout en soulignant l’importance de la mise en œuvre effective. La Fédération de Russie, la Tunisie, l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis, le Soudan, le Viêt Nam, le Yémen, Bahreïn, Brunei et le Venezuela ont insisté sur la lutte contre la pauvreté, le droit au développement, les réformes institutionnelles et l’égalité territoriale. Singapour, l’Albanie et la Bolivie ont encouragé la poursuite des efforts nationaux pour stabiliser la gouvernance et garantir les droits fondamentaux.

Le 1er juillet 2025, lors de l’adoption du rapport final, plusieurs organisations non gouvernementales ont présenté leurs observations. Leurs déclarations ont porté sur des problématiques graves et persistantes en matière de droits humains.

Humanists International a dénoncé l’absence de protection contre le viol conjugal en Irak, l’impunité des auteurs de violences basées sur le genre, ainsi que le maintien de lois discriminatoires telles que l’article 398 (qui exonère de poursuites les auteurs de viol en cas de mariage avec la victime) et l’article 41 (donnant au mari un droit légal de corriger son épouse). L’organisation a également exprimé son inquiétude face à la persistance des mariages d’enfants, parfois dès l’âge de 12 ans.

La Lutheran World Federation, tout en saluant les efforts entrepris, a souligné l’écart entre engagements et mise en œuvre. Elle a recommandé une loi globale contre les violences domestiques, la criminalisation du viol conjugal, et la levée des réserves à la CEDAW (articles 9 et 16).

L’Anglican Consultative Council a soutenu les recommandations en faveur des droits des femmes et des minorités, et a appelé à garantir la liberté religieuse, à mettre fin à l’enregistrement des confessions religieuses dans les bases de données de l’État, et à améliorer la transparence judiciaire.

L’International Council Supporting Fair Trial and Human Rights a salué certaines réformes, mais a exprimé des inquiétudes sur la liberté d’expression et les disparitions forcées. Il a plaidé pour un moratoire sur la peine de mort, la protection des journalistes et une commission nationale des droits humains indépendante.

Maat for Peace, Development and Human Rights a salué la loi d’amnistie générale ayant permis la libération de 19 000 détenus, mais a dénoncé les réformes facilitant le mariage des mineures, appelant à une stratégie nationale contre les violences faites aux femmes.

COC Nederland a alerté sur les graves reculs des droits des personnes LGBTQ+ en Irak, notamment la criminalisation des relations entre personnes de même sexe et des expressions de genre non conformes, en contradiction avec les engagements internationaux du pays.

Le Gulf Centre for Human Rights a regretté le refus de ratification de traités clés (Protocole contre la torture, Statut de Rome, Convention sur les travailleurs migrants), et dénoncé l’usage abusif du droit pénal pour réprimer la liberté d’expression.

Alliance Defending Freedom a soutenu la liberté religieuse tout en appelant à l’abrogation des lois sur le blasphème et à une meilleure protection des minorités religieuses telles que les yézidis.

Meezaan Center for Human Rights a estimé que les recommandations de l’EPU étaient restées lettre morte. L’organisation a dénoncé des violations massives, dont les disparitions forcées, les exécutions arbitraires et les détentions illégales, et a exigé des réformes structurelles urgentes.

Maloca Internationale, au nom du Centre Zagros pour les Droits de l’Homme et de 24 autres organisations, a dénoncé la politisation des droits économiques et sociaux dans le Kurdistan irakien. Elle a souligné les conséquences de la suspension unilatérale de la part budgétaire de la région par Bagdad, privant plus de six millions de citoyens d’accès aux services essentiels. Le non-respect de l’article 140 de la Constitution a également été dénoncé. Les signataires ont demandé un mécanisme international de suivi pour garantir l’équité budgétaire et les droits fondamentaux.

Liste des 26 organisations signataires
Maloca Internationale, Centre Zagros pour les Droits de l’Homme, Barzani Charity Foundation / BCF, International Yazidis Foundation for the Prevention of Genocide, Public Aid Organization, Society for Development and Community Empowerment (SDCE), Association Culturelle des Tamouls en France, Jeunesse Étudiante Tamoule, Association des Étudiants Tamouls de France, Actions Écologiques Françaises, Association pour le Droit de l’Homme et le Développement Durable (Colombes), Les Caribous Libérés, Le Pont, Tamil-Style, Association Thendral, Association Bharathi Centre Culturel Franco-Tamoul, ABC Tamil Oli, Association pour la Solidarité Internationale, Tourner la Page, ADEAGE, Association caritative étudiante pour la jeunesse, Association Droit et Talents de Femmes, Association Lutte contre la Violence faite aux Femmes, Association pour la Diffusion des Droits de l’Homme dans l’Université de Lyon, AJIS, Étudiants pour une Société Durable Paris.

Conclusion
En clôture, S.E. Abdul-Karim Hashim Mostafa a remercié les États et ONG pour leurs contributions, a réaffirmé l’engagement de l’Irak à coopérer avec les mécanismes internationaux et à soumettre ses rapports, et a insisté sur l’importance du soutien des agences de l’ONU pour garantir une mise en œuvre effective.

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Annexe – Déclaration conjointe soumise au Conseil des droits de l’homme :

Conseil des droits de l’homme – 59e session
Déclaration orale conjointe
Point 6 : Adoption de l’EPU – Irak

Monsieur le Président,

Nous prenons note des engagements exprimés par l’Irak lors de son Examen périodique universel, notamment les stratégies en faveur des femmes et des enfants, ainsi que l’adoption de la loi sur les survivantes yézidies. Toutefois, nous regrettons qu’un enjeu crucial soit absent du rapport : la politisation persistante des droits économiques et sociaux dans la région du Kurdistan d’Irak.

Depuis des années, la suspension répétée par le gouvernement fédéral de la part du budget national garantie par la Constitution à la région du Kurdistan a gravement porté atteinte aux droits de plus de six millions d’habitants. Ces mesures compromettent l’accès aux soins de santé, à l’éducation, à la protection sociale et à un niveau de vie décent — affectant de manière disproportionnée les femmes et les enfants. Cela constitue une violation manifeste du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, auquel l’Irak est partie.

Par ailleurs, le non-respect persistant de l’article 140 de la Constitution irakienne — qui prévoit une normalisation, un recensement et un référendum dans les zones disputées — illustre un schéma plus large d’application sélective de la Constitution, au détriment des communautés de la région du Kurdistan.

Bien que le rapport de l’EPU souligne certaines avancées, il ne traite pas de cette crise socio-économique persistante causée par des décisions politiques punitives. L’instrumentalisation des salaires du secteur public et les retards dans les transferts budgétaires ont plongé des milliers de familles dans la pauvreté et l’insécurité.

Nous, les 26 organisations signataires, appelons donc le Conseil et les États membres à envoyer un message fort : les droits fondamentaux et les garanties constitutionnelles ne doivent jamais être instrumentalisés à des fins politiques. Nous demandons la mise en place d’un mécanisme international de suivi afin d’assurer le respect équitable des obligations constitutionnelles de l’Irak et de protéger les populations vulnérables, en particulier les femmes et les enfants.

Nous vous remercions.

Document :

Rapport du Groupe de travail sur l’Examen périodique universel